jeudi 14 novembre 2013

Certaines n'avaient jamais vu la mer

Source image: Goodreads.com
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Certaines n’avaient jamais quitté leur village au Japon, certaines habitaient Tokyo ou Kyoto et évitaient de fréquenter les paysannes sur ce bateau qui traversait l’Océan Pacifique, certaines avaient laissé un enfant derrière elles, d’autres une mauvaise réputation, d’autres juste la pauvreté.
Mais elles avaient toutes un point commun : elles allaient épouser un homme qu’elles ne connaissaient que grâce au portrait qu’il leur avait adressé. Elles étaient toutes sur ce bateau en direction de la Californie à se demander ce qui les attendait.
Julia Otsuka, dans ce deuxième roman publié chez Phébus en 2012 (et en septembre 2013 chez 10/18), nous livre le récit poignant de ces Japonaises que l’on mariait à distance dans les années 1920 à des Japonais installés aux Etats-Unis.
Ce n’est pas l’homme qu’elles avaient presque admiré sur une photo qui les attendait sur le quai, mais un homme avec vingt ans de plus ou juste son voisin plus disgracieux. Ce n’est pas l’homme qui avait un beau costume et une belle maison mais un homme qui travaillait sur les champs pour un « Blanc » qui le méprisait. Ce n’est pas la vie au foyer dans une belle maison qui les attendait mais un dur labeur dans les vergers, pour faire ce travail qu’aucun Américain n’aurait fait.
Dans ce roman à plusieurs voix, l’auteur nous livre le désespoir de ces femmes qui ne pouvaient plus rentrer chez elles, qui étaient maltraitées par leur mari voire par leur patron, qui ont décidé de s’enfuir et qui se sont retrouvées dans des maisons closes. Certaines, plus chanceuses ont aidé leur mari dans leur restaurant ou ont trouvé un second « mari », plus gentil.
C’est aussi l’histoire de leurs enfants qui ne voulaient surtout pas être comme leurs parents et qui devaient toujours vérifier que le restaurant où ils sortaient le soir acceptait bien de servir les Japonais.
Puis, c’est l’isolement de la Seconde Guerre Mondiale, une époque où elles devaient passer encore plus inaperçues qu’elles ne l’étaient déjà. Était-ce possible alors qu’on avait dressé des listes sur lesquels leurs noms, celui de leurs maris, de leurs enfants figuraient ?
Julie Otsuka est une virtuose des mots. Elle raconte ici l’histoire de femmes si discrètes qu’on les avait oubliées. Il est difficile de lire ce livre en diagonale car chaque mot, chaque expression, chaque phrase a un sens qu’on ne veut surtout pas laisser échapper.
Bonne lecture !

4 commentaires:

  1. Je viens de découvrir ton article sur So Busy Girls et il m'a énormément touchée ! Tu m'as donné très très envie de lire ce livre, et je tenais simplement à te remercier pour cette belle découverte :)
    Passe une très bonne soirée !

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  2. C'est un roman que j'ai envie de découvrir et ton billet ne fait que confirmer cette envie !

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